La nuit tombait doucement sur le campus. Le ciel rouge s’assombrissait de plus en plus pour laisser bientôt place au bleu sombre de la nuit et à la pâleur argenté de la lune presque pleine qui brillait déjà haut dans le ciel. C’était un soir calme et Lucian ferma son bar. Les rues étaient presque désertes, les quelques élèves restant rentraient chez eux. Lucian lui n’irait pas dormir chez lui ce soir, cette nuit, il allait se préparer à la pleine lune en laissant la bête sortir un peu avant. Il n’avait pas perdu le contrôle de lui-même depuis bientôt cinq ans, mais c’était une habitude qu’il avait prise. Il se rendit donc à la lisière de la forêt. Il s’enfonça un peu dans la foret puis trouva ce qu’il cherchait. Il regarda autour de lui pour s’assurer qu’il n’y avait personne qui le verrait puis il se déshabilla. Il fourra ses vêtements dans un sac de sport qu’il dissimula dans le creux d’un tronc d’arbre. Il se redressa en vérifiant à nouveau qu’il n’y avait personne aux alentours. Lucian inspira un grand coup et expira lentement en décontractant tout ses muscles et faisant le vide dans sa tête. Puis il lança sa transformation horriblement douloureuse comme d’habitude. Il hurla comme jamais un homme n’avait hurlé, il s’effondra à terre n’ayant pas la force de se maintenir débout. Tout ses os se brisaient, ses muscles se déchiraient, ses nerfs burlaient. Dans un spasme musculaire de douleur, Lucian bondit en avant. Il tendit les mains en avant pour ne pas s’écraser au sol la tête la première, mais ce fut des pattes qui touchèrent le sol, des pattes qui enchainèrent le mouvement et le reste du corps suivit.

Lucian était maintenant sous sa forme de loup géant, courant à travers la forêt aussi vite que possible. Des gerbes de terres jaillissaient sous chacune de ses pattes à chaque impulsion. Lucian oubliait la douleur de ses transformations en utilisant son corps endolori. Il oubliait la douleur qu’il venait d’avoir en donnant le maximum de ses capacités physiques. Il courait ainsi dans la forêt, filant entre les arbres, sautant les racines, esquivant les branches, arrachant les feuillages. Tout ces sens étaient en alerte ; malgré la douleur et l’effort de la course, Lucian s’entrainait aussi à réfléchir sous l’effort et la concentration. Il essayait de capturer des odeurs, trouver des proies, des animaux sauvages, essayer de savoir ce qui l’entourait tout en galopant de plus belle. Dans sa course, Lucian sentit l’odeur d’un cerf, et des plusieurs sangliers, mais il ne se sentait pas d’humeur à chasser ce soir. Il décida de se diriger vers les hauteurs de la forêt, une partie qui ressemblait à une montagne. Il monta puis trouva son endroit préféré ; un immense rocher qui pointait vers le ciel, vers la lune. Ce rocher dominait la forêt et une partie du lac céleste un peu plus bas. Il bondit sur le rocher et se précipita à la pointe. Il s’arrêta en forçant sur ses pattes avant en se penchant en avant, baissant la tête de force. Puis il se releva en commençant un hurlement. Il jeta la tête en arrière, le museau pointant le ciel en hurlant de plus en plus fort. Ilse sentait bien ce soir et il le hurlait ; à la lune, à la forêt, aux animaux, au monde. Et peut-être même à quelques semblables qui comme lui parcouraient peut être la forêt. Son hurlement résonna dans la forêt, son hurlement solitaire de loup sans meute.